terça-feira, 3 de novembro de 2015

PASSIONS ET PASSIONNẺS DE L’AMOUR EN HOMEOPATHIE1

Passionnés de l’amour de l’autre, de l’amour de soi ou encore de celui qui transcende et relie à une
instance supérieure...
Passionnés de la vie et de ce qu’elle peut comporter de don fondamental, venu d’un Ailleurs aussi
tendre que chaleureux et aimant...
La vie qui traverse l’être est ‘cadeau’...Elle est don généreux et gratuit...
Elle ouvre sur un mystère où, fût-elle altérée parfois par bien des aléas, la chaleur du ventre maternel
a permis la croissance, la plénitude ...
Elle est imaginairement associée à un Nirvana que chaque être va tenter de retrouver et de
reconquérir, même si l’imparfait attaché à ce qui fait naître à la séparation donne au narcissisme
premier toute son importance en terme de survie physique et psychique...
Les Matières médicales homéopathiques regorgent de ces amoureux de l’autre, de soi ; de ces
passionnés du monde, des sensations qu’il produit ; et que l’être perçoit jusqu’au moindre
centimètre de sa peau...
Les antennes de PHOSPHORUS sont là pour en témoigner ...Elles disent combien, passionné de la vie
sous toutes ses formes, il est au point d’en communier avec les moindres de ses saveurs ou
expressions subtiles.
Lettres ou déclarations aussi enflammées que poétiques à sa muse...En laissant émerger la beauté de
sa créativité et de ses envolées épistolaires, Phosphorus amoureux devient le prototype du
passionné de l’autre ...Il est là, le Don Quichotte qui va chercher le graal pour sa douce princesse, le
chantre de l’amour sous les fenêtres de sa belle, le champion de tous les excès pour chanter l’amour
sous sa forme la plus éthérée et magique...
Passionné, Phosphorus l’est on ne peut plus : passion pour un être, passion pour l’autre au point de
la compassion, passion pour les autres ; humain avant l’heure, inconditionnel de l’humanitaire, il est
en général bien peu passionné de lui-même...
S’il ne peut assouvir sa passion directement, c’est dans l’imaginaire qu’il va trouver sa force et
enflammer ses sens, pour donner réalité et signification au monde idéal dont il rêve et quête la
présence... Ses passions amoureuses en sont teintées...Ses écrits poétiques, sinon exaltés, donnent à
sa passion un ton éthéré, mais non moins réel... : « Levez vous Orages désirés qui devez emporter
René dans les espaces d’une autre vie »... la passion de Châteaubriand rejoint le désespoir alourdi des
parfums et des fumées enivrantes porteuses d’oubli de Baudelaire : « Sois sage ô ma douleur et tiens
toi plus tranquille, tu réclamais le soir, il est là, le voici...Vois se pencher les défuntes années sur les
balcons du ciel en robes surannées, surgir du fond des eaux le regret souriant...»...
Nostalgie, regrets...
Derrière la passion, le souvenir et l’imaginaire espace où, toute passion éteinte, la quiétude était là...
Une patiente jeune, devenue tétraplégique à la suite d’un accident, n’a-t-elle pas un jour déclaré de
manière on ne peut plus saisissante : « Bien sûr Madame, c’est dur, mais savez vous, je ne donnerai
ma place pour rien au monde...Je suis à la recherche de ce que j’ai vécu de manière prodigieuse, alors
que j’étais clouée par les perfusions et que j’émergeais de mon coma...J’ai senti ce qu’était la vie en
moi...Et, depuis, je suis en quête permanente, pour retrouver ce qui, pour moi, a constitué le ‘bonheur
absolu’»...Propos relayé par une autre jeune femme de type Sepia paralysée de la même manière,
mais inscrite dans une autre dimension de la relation au monde : « Bien sûr que cela n’est pas rose
tous les jours, mais je ne regrette rien. Grâce à cela je mourrai ni idiote, ni suffisante !»...
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Texte intégral dont a été tirée la communication présentée au Congrès de FNSHMF Valence mai 2015
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Quiétude d’avant, quiétude recherchée...La passion est au cœur de ce qui soutient la vie et le désir
qui y est attaché... Phosphorus en est le représentant le plus manifeste. S’il constitue avec
Tuberculinum le champion de ces passionnés du monde, tout comme le chantre de sa beauté et de
cette harmonie qui en fait le cœur, Calcarea phos et Kali phos en expriment pourtant, déjà la
difficulté :
Le premier fuit le contact et s’agite alors que, comme le disait Jacqueline Barbancey, son besoin
affectif est aussi fort que celui de Pulsatilla ; le second tressaille au moindre bruit et réagit au
moindre contact, tant son ressenti du monde passe par tous ses sens et l’inscrit de manière marquée
dans le monde de la perception...
Les Tuberculiniques sont des passionnés de la vie et de ce qui en a fondé l’apparition...
Cadeau que la vie...La passion qui les soutient en témoigne...
Expression d’un amour absolu et sans contrepartie, elle traverse l’être et, dès son premier instant,
l’inscrit dans cette réalité fondamentale...La manière dont celle-ci va se voir dévoyée appartient à
l’humain et aux déclinaisons du narcissisme qui, dès le départ, conditionne la survie...Luèse et Psore
toutes ensemble confondues, vont en transformer le vécu. Les ‘miasmes’ inhérents au processus
évolutif et à ses aléas adaptatifs font alors leur œuvre destructrice, en même temps qu’ils favorisent
constructions et créations nouvelles...
Passion de l’amour de soi ou de l’amour de l’autre dans ses aspects dévoyés...
Ὰ moins qu’ils ne prennent un visage désincarné, ces derniers se partagent alors le devant de la
scène.
PLATINA se pose ici en championne de l’amour de soi.
Quête de reconnaissance, désir de puissance donnent à la qualité de son amour un ton assez peu
désintéressé...La séduction et les stratagèmes trompeurs sont à leur comble. Ils donnent à sa passion
un ton bien peu authentique, hormis lorsque la perte de pouvoir et la sensation d’être en danger de
perdre sa place, réveillent chez elle instinct vengeur et désir de survie...La passion affichée, si elle est
sincère pour témoigner de la passion d’elle-même, n’en est pas moins inauthentique vis-à-vis de
l’autre...Malheur à lui s’il s’y laisse prendre...Comme le dit si justement la voix de Carmen... « Et si tu
m’aimes prends garde à toi... ! »
Passion funeste mêlée de douleur et de mort. Celui qui en pâtit est en danger...Mais pas seulement...
Délaissée ou abandonnée, Platina vit une passion tragique. Elle peut en mourir, autant de colère
retournée contre soi, que de désespoir d’avoir ‘perdu la partie’. Le suicide est possible. Il est alors
teinté de la marque de la mélancolie ; à moins que le retrait alcoolisé et la fuite hors du monde ne
révèlent la force d’un Natrum mur sous-jacent... Abandonner ce monde dont n’est pas ressentie la
consolation, mais dont l’on n’attend rien puisque, « L’on est seul à savoir ce qui est bien pour
soi »...Orgueil quand tu nous tiens !!!
Sur bien des points, en effet, Natrum mur n’est pas loin de Platina ; mais la sensibilité et la
vulnérabilité sont trop vives pour témoigner de la sclérose, de la forme de malice et de la malléabilité
apparente conférée par ce métal : substance à la fois dure et malléable préfigurant la psychologie de
Platina dans son essence profonde, le platine il prend la teinte du sel auquel il est lié...
Les passions amoureuses de NATRUM MUR sont silencieuses et bien paradoxales. Il fuit ce qu’il
désire et se rapproche de qui l’indiffère. Le narcissisme n’est pas loin, exacerbé par le moindre
manquement de l’autre, par l’absence d’attention témoignée, ou par la méconnaissance de sa
passion muette. Mais qui peut s’en douter alors qu’il ne dit rien, ou souvent fuit et répond par un
silence bougon ou une onomatopée : Natrum mur veut être deviné et compris, sans aucun signe de
sa part. Il espère secrètement que le monde va être à l’image de ce dont il rêve, mais, paradoxe du
personnage, il s’en éloigne au moindre signe de dysharmonie ou d’imaginaire rejet...
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Si l’attachement à l’autre est fidèle et sans faille, faut-il y déceler la marque secrète d’une angoisse
d’abandon, sinon d’éclatement des points de repère. Ne vont- ils pas parfois jusqu’au point de la
rétraction autistique ou de la dissociation psychique ?
C’est ici l’un des aspects secrets de cette passion amoureuse de Natrum mur...Marqué à vif par le
sentiment de la séparation première qui mène parfois le nourrisson qu’il a pu être, jusqu’au bord de
la mort psychique, sinon de la mort tout court, il s’absente du monde, se retire de la vie et fait
montre de troubles de la fonction symbolique.
Le manque de confiance en soi flagrant et la difficulté de contact qu’il manifeste à l’âge adulte,
donnent à ses attachements amoureux un aspect des plus paradoxaux ; d’un côté une peur de l’autre
dont l’on désire pourtant la présence et l’attention ; de l’autre une constance aussi fidèle que
secrètement structurante...C’est grâce à elle que l’on peut en arriver enfin à « s’ouvrir » un peu à
l’autre ; ce qui signe là amélioration et abandon de bien des défenses.
Si Natrum mur parle peu, il est important de souligner qu’il dit beaucoup...Mais faut-il savoir
l’observer pour en observer les signes secrets et en mesurer le cheminement. L’aide apportée par
l’approche homéopathique et la prescription de quelques doses adaptées dans la dilution choisie,
peuvent permettre ici une évolution appréciable...
Champion ou championne de l’amour de soi ; à défaut de l’amour véritable de l’autre, sinon dans
une passion idéalisée, LYCOPODIUM excelle et se cache dans un paradoxe trompeur. Si la passion ne
sert ici que son besoin de combler son « manque » à être reconnu dans son besoin véritable et à être
aimé à la mesure de sa nécessité, Lycopodium n’en est pas moins un passionné de la vie...Son côté
psorique et souvent tuberculinique y sont pour quelque chose.
Idéaliste et acteur de grandes œuvres qu’il va dessiner en sous mains, défenseur de ce qui est pour
lui le « juste », sinon « la cause de la veuve et de l’orphelin » ; il met souvent sa passion au service de
l’autre et des autres.
Tente-t-il de réparer ce qui, en lui, a, sans nul doute, été secrètement brisé ? Cherche-t-il à retrouver,
sinon à recréer la confiance et l’assurance d’un amour sans faille ? Qui sait ?
S’il exprime son paradoxe dans son désir de savoir l’autre, ni trop proche, ni trop loin ; s’il lui donne
au maximum de ce que son amour de lui-même lui permet ; faut-il reconnaitre chez lui une forme de
fidélité.
Son désir de stabilité allié à la crainte d’un contact trop intime, l’angoisse d’un abandon qu’il craint et
tente pourtant de provoquer, donnent à ses passions un tour aussi solide qu’insécurisant...
Passion de l’autre, passion des autres, dans la misère desquels il se reconnait...Il les méprise tout à la
fois pour leur manque de lucidité, leurs faiblesses et leurs manques, visibles ou cachés.
Lycopodium montre ici d’étranges facettes...Rejetant et pourtant présent, cruel et secrètement tenté
de séduire sa proie et ses admirateurs, il dit le paradoxe d’un passionné de toute œuvre tournée vers
l’humanité, mais pourtant bien peu au service des humains...
Amour de soi au travers de l’amour de l’autre, Lycopodium tente de se donner à lui-même ce qui, a
ses yeux, lui a été par trop refusé...
Fidèle à ses engagements davantage par principe que par conviction personnelle, vu la piètre opinion
qu’il a de l’autre et de l’humanité toute entière, il réagira mal à tout manquement de ce type... -
« J’aime l’humanité ; mais je n’aime pas les humains » pourrait constituer sa devise habituelle-. Il fera
alors tout pour empêcher un abandon aussi mal vécu sur le plan narcissique, qu’il confirme son point
de vue et justifie ses craintes, alors même qu’il a tout fait - il le reconnait parfois bien amèrement-
pour le provoquer...
Passion de l’autre, passion de soi...AURUM en montre, quant à lui, un tout autre visage. S’il camoufle
tout au fond de lui sa fragilité secrète, il a bien des difficultés à « dire » ce qui le hante et envahit sa
conscience de bien singulières émotions. « Mettre en mots » n’est pas son fort...Si la nature de ses
tourments a du mal à se dévoiler, leur ampleur en montre un visage à la fois inquiétant et particulier
à force de colère, de violence et de cris.
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La culpabilité qui se dit au moindre de ses débordements injurieux et tonitruants, donne à sa passion
et à son amour un tour aussi mouvementé que passionnel...Personnage de Dostoïevski, leader de
groupe aussi admiré et aimé, que craint et parfois haï, Aurum se révèle au travers de ses excès de
comportements : ils flirtent autant avec l’extrême qu’avec le sublime...La mort est en arrière-
plan...Elle fait craindre la fureur autant tournée vers qui le met en cause ou le contrarie, que
retournée contre soi...
« Aurum, tourné vers l’autre », est étrangement en quête de lui-même...S’il œuvre pour l’autre, c’est
aussi pour lui-même qu’il rentre en action...
Quête de reconnaissance, quête de sens pour éclairer l’absurde qui se glisse dans chacun des
mouvements au quotidien, il se retrouve quelque part perdu...Pris entre le désir d’expansion et celui
d’oublier les sphères morbides au cœur lesquelles il déplace sa souffrance secrète, ne tente-t-il pas
désespérément de trouver le contour de lui-même dont il ne sait, ni la raison d’être, ni la finalité
cachée ?
Sa passion tumultueuse pour la vie et pour ce qui en exprime les facettes cachées, font de lui un
amoureux attachant, mais ô combien pénible...
Il rejoint ici MERCURIUS SOLUBILIS torturé par ses insuffisances et tiraillé entre ses désirs
d’expansion, l’insuffisance de ses moyens et les pulsions agressives qui le tenaillent. Il faut dire qu’il
en redoute assez fort l’irruption, vu la manière dont elles ont dû être étouffées dans le milieu violent
et souvent peu cohérent dont il est issu.
Passion de l’autre certes, vu le manque, la fragilité et le désir bien maladroitement exprimé de
reconnaissance. Mercurius sol communique mal et souvent à contretemps : ses colères et sa rage se
voient pas toujours bien contenues...La frustration est difficile à assumer avec ce qui en découle
d’impulsions mal retenues et de gestes parfois aussi cruels qu’impuissants envers plus faible que
soi...La culpabilité obsessionnellement remâchée au point d’en altérer le sommeil, aggravent ici la
souffrance et les réactions passionnelles mal canalisées.
Passion de soi plus cachée pour PULSATILLA homme ou femme.
Ne sont supportées ici, ni la séparation, ni l’absence ou l’insuffisance de marques de tendresse ou
d’affection maternante : l’attraction exercée par les eaux matricielles et le suicide par noyade vers
lequel Pulsatilla se tourne à la manière d’Ophélie, en sont le bien triste rappel.
Si la dépendance justifie ici le désir de ne rien changer aux repères du quotidien, dès que la sclérose
du système artériel amène des réactions plus sthéniques, il se pare de réactions de jalousie. C’est
pourtant là un comportement assez peu habituel chez ce personnage habituellement doux, porté aux
pleurs faciles, mais assez vite consolable...
Son amour solide et tranquille se révèle souvent au contact d’un ou une autre Pulsatilla ; parfois d’un
ou une Calcarea carb, donnant alors à voir un couple d’aspect quelque peu arrondi ; que ce soit au
sens propre, comme au sens figuré.
Lycopodium noue par contre avec elle (lui) une relation des plus problématiques : insécurisé par se
faiblesse apparente et à ce qui en elle (lui) le renvoie à ses propres manques, il en devient davantage
caustique et agressif ; ce qui ne fait alors qu’aggraver la situation.
S’il est peu verbalement expressif quant à la valeur, la constance et la profondeur de ses affects,
CALCAREA CARB n’en est pas moins un passionné tranquille. Si sa manière assez conformiste et un
peu stéréotypée de dire sa passion n’est pas entourée de panaches, elle n’en est pas pour autant
moins profonde et réelle : Calcarea carb dit peu mais agit. Il se montre à la fois présent et constant.
Mais, attention si un changement est apporté à ses habitudes ou à ses points de repère affectifs...Il
ne dira rien mais déprimera en silence ou manifestera sa détresse au niveau de son corps. Lenteur,
productions tumorales, lithiases sont alors au rendez-vous, pour dire ce que les mots n’ont pu
exprimer.
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Il rejoint là GRAPHITES aux prises avec sa fatigabilité, à ses angoisses velléitaires, à son mal-être et à
ses pleurs, ou encore BARYTA CARB, timide, renfermé, mais hypertendu et sujet au parkinson.
Passion de soi, passion de l’autre...La pauvre ou le pauvre THUYA est bien embarrassé...
La crainte de n’avoir pas été conforme, à la hauteur, ou dans la justesse de ce se devait d’être, la (ou
le) tenaille. Les quelques sursauts de vie qui l’assaillent et témoignent de la Psore sous-jacente,
l’amènent parfois à avoir un comportement plus léger...Mais ils retombent vite : chez elle- ou lui- la
fixité des idées et l’angoisse d’avoir « mal fait » l’emportent sur la joie...Malheureusement alors, dès
lors qu’un moindre déséquilibre apparait, la passion se vit voilée, sinon éteinte par la dépression et la
peur sous-jacentes...
Passion de soi camouflée ou camouflant celle de l’autre : c’est ici celle de CAUSTICUM qui, idéaliste,
rêve de voyages et d’avoir le loisir et la capacité de pouvoir se mouvoir, sinon s’élancer vers des
terres plus clémentes. Le Tuberculinisme n’est pas loin...Il se voit, hélas, freiné dans ses mouvements
et ses aspirations, par un corps enraidi et des capacités réduites. Elles ne laissent alors place qu’à la
seule compassion...
La passion de la vie et de l’autre est ici, à ce point enfermée dans un carcan, qu’elle amène à ne pas
« supporter » la moindre « position avachie devant soi » : quelque peu fermé à la différence et
critique malgré lui, Causticum ne fait montre alors ni de la réalité de ce qu’il est, ni de ce qu’il
souhaite vraiment. Amoureux triste et assez rigidifié dans ses attitudes intérieures et extérieures, il
ne dévoile de sa passion qu’un visage déformé par ce qui le fige et le sclérose, au sens propre comme
au figuré.
ARSENICUM ALBUM qui pourrait à première vue être ici placé dans le même registre, se montre
finalement un peu différent. Pas plus de passion pour l’autre, que de passion pour soi ! La mesure est
de mise ; tout comme le strict respect des principes et des engagements. La loi c’est la Loi...Ni plus, ni
moins ! Là où, témoignant de son tuberculinisme de fond, Causticum réagit face à ce qui lui rappelle
sa triste condition, mais fait montre de compassion face à ce qui l’unit à la misère de l’autre,
compagnon de voyage dans le monde des humains ; Arsenicum album témoigne de bien moins
d’aménité : amoureux de l’ordre qui le rassure et lui permet d’exercer la seule puissance qui lui reste
dans cette existence sans éclats ou véritable folie, il reste peu sensible à l’autre en tant que tel...
S’il se laisse parfois aller à des écarts amoureux ou passionnels, c’est dans la culpabilité angoissée
qu’il en limite l’expression. La force de la pulsion qui l’envahit et le mène parfois à des
comportements des plus surprenants, sinon inavouables chez lui, le dérange on ne peut plus...
Chez lui, la passion ne se déchaîne pas souvent au contact de la vie, elle est plutôt marquée par le
fantasme et la jouissance tournée vers soi... « L’autre » est ici « l’objet qui permet que »...Et, à moins
qu’il ne soit une voie « qui permette de », il n’est pas toujours un humain : possessivité, désir de
posséder, sont ici sur le devant de la scène...L’amour est là, mais il se tourne vers ce qui ne risque pas
d’échapper et amène à se rassurer...Les flammes dans le regard d’Harpagon sont ici pour le dire, qui
témoignent ainsi de la seule passion qui ne soit pas susceptible de trahir...
La sécurité et la thésaurisation voluptueuse remplacent bien souvent la passion
amoureuse...Empoisonné par ses peurs, ses doutes et les angoisses qui paralysent sa mentalité face à
un lendemain terrorisant, Arsenicum se tourne vers le seul espace qui lui permette de se sentir un
peu « vivant » ; à savoir ses possessions et ce qui est « soi ».
L’intérêt pour l’autre n’est pas feint pour CYCLAMEN ; mais comment se permettre d’être soi-même
et dans la liberté de ‘dire’ ou de faire, lorsque les scrupules envahissent jusqu’au point de favoriser la
migraine...
Fiable, présente, attentive, même si, enfermée dans le mouvement incessant de son mental, elle en
arrive à avoir des troubles de la vue, Cyclamen est gênée dans sa relation par la peur obsessionnelle
de mal faire, mal dire, n’avoir pas fait assez...
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Sa liberté de manœuvre est faible et semble bien moindre que celle de Sepia. Si elle lui ressemble
quelque peu, l’on ne peut nier à quel point son monde apparait plus enfermé et envahi par les
soucis. Elle recherche la solitude ; et la fatigabilité que lui confère sa tendance à l’anémie, n’est pas
ici pour améliorer sa passion de l’autre et d’elle-même.
SEPIA ... : passion de l’autre, vie consacrée à l’autre, dévouement à l’extrême jusqu’au point d’une
forme de masochisme non nié, sinon même revendiqué...La fiable et consciencieuse Sepia en est le
prototype presque caricatural...
Hantée secrètement par une profonde angoisse d’abandon et par une forme de désespérance plus
ou moins avouée sur la possibilité d’un amour sur terre, elle donne à l’autre ce qu’elle n’a pas reçu.
Suprême jouissance teintée de renoncement, elle n’en attend RIEN...Active lorsqu’elle n’est pas dans
sa phase asthénique, peut-être montre-t-elle, au-delà de son attention permanente à l’autre, une
forme d’orgueil secret quant à l’image qu’elle se renvoie d’elle-même. L’image de l’anorexique
qu’elle a pu être dans sa fragile et douloureuse adolescence est là...Elle est là pour l’inciter à aller au-
delà de la médiocrité du monde en « se passant de tout », faute d’avoir un jour, eu la sensation
d’avoir eu ou été, autre chose que Rien...
« Indifférente à ceux qu’elle aime le plus profondément » dit la Matière médicale...Le paradoxe est là,
qui amène Sepia à entrainer ses enfants dans la mort, pour ne pas les laisser seuls et sans aide, livrés
à un monde à ce point inhumain.
Paradoxe aussi, lorsque, femme silencieuse mais non moins efficace, elle voue à son patron une
fidélité et un amour aussi secret que sans faille : elle succombe alors à la tentation de l’anémie dans
le syndrome de Lasthenie de Ferjol2 en se créant une pathologie mystérieuse qui amène à concentrer
toute l’attention sur elle.
Langage à décrypter que celui d’une passion qui ne se dit pas, mais se vit dans une douleur oblative
et teintée de masochisme, où tous les excès sacrificiels se conjuguent au point d’en arriver à
accepter de voir être sacrifiés ses propres enfants...Victoire sur ce qui soumet mais qui dans le fond
mal accepté, se veut alors secrètement être une manière de défier la mort et l’insupportable de la
séparation qui y est liée...
Passion de Sepia pour l’autre, le même dont l’on devient le collaborateur, sinon le mentor
indispensable. Nux vomica en bénéficie ô combien...Lycopodium se voit parfois l’objet d’une
vengeance torpide -mais non moins éclatante et silencieuse lorsque, cynique, humiliant et
dépréciateur, il provoque sa compagne...Il en reste des plus surpris et ulcéré. Si Sepia pleure, elle le
fait en silence. Il ne voit donc rien venir de ce qui peut porter son ‘souffre-douleur’ à aller trouver
une consolation entre des bras qui, faute parfois d’être fiables, se présentent en tous cas comme
plus chaleureux.
Passion de Sepia en quête du regard qui a manqué ou qu’elle a bien souvent idéalisé : mère
insuffisante, père souvent considéré comme porteur de toutes les qualités, ou encore, vu son
impossibilité à répondre à cette attente, remplacé par un p(P)ère idéal, auquel nul ne pourra se
comparer...Faute de pouvoir en être imaginairement comblée ou d’en vivre la présence à l’ombre
d’un couvent ou dans la confiance conférée par la foi, Sepia se voit conduite à la solitude. Mais n’est-
ce pas ce qui, dès le départ, a été le lot de Sepia au quotidien ?
NITRIC ACID est ulcéré par tout ce qui, en lui, s’ouvre au monde...Pas plus que IODUM cruel avec les
siens, HEPAR SULFUR, « irrité », « irritant », « irritable » ou encore FLUORIC ACID, volage et
indifférent, il n’est le champion des passions partagées. Personnage acide et critique, il attire mal les
suffrages et les relations paisibles...
2
Décrit en 1987, ce syndrome fait partie des « troubles dits « factices » et touche souvent des femmes
travaillant dans le milieu médical qui se créent par des scarifications ou des soustractions de sang sous
anticoagulants, une anémie justifiant multes explorations. Godfroid IO : Le syndrome de Ferjol. In : La
psychiatrie de la femme. Paris : PUF, 1999.
6
Bien d’autres pourraient être encore cités ici, qui, chacun à leur manière, pourraient témoigner de
leur passion de l’autre et de la vie.
Certains sont, parmi eux porteurs de ce qui depuis leur plus tendre enfance leur en a donné le goût
et le désir alors que d’autres se révèlent les témoins de ce qui en a dévié le sens et les amener à
développer plus particulièrement la passion de soi...
Mais, peut-être, peut-on donner le mot de la fin à Sir Roger L’ESTRANGE3 pour dire avec lui :
« Il en est de nos passions comme du feu et de l’eau.
Ce sont des bons serviteurs et de mauvais maitres ».
Docteur Geneviève Ziegel.
Montpellier Septembre 2015

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